BFF des nappes à carreaux rouge-paysages des premiers RTT, et camarade du travailleur qui casse la croûte. Star interculturelle du manger populaire, je suis un monstre d’inventivité et d’adaptabilité. Ils me ressemblent tous, et pourtant d’aucuns n’ont leurs pareils. Objet fonctionnaliste permettant l’économie du temps, je suis le fils légitime des sucres rapides et des matières grasses. (..) Oui, j’ai bouleversé vos moeurs et transpercé vos coeurs. Car je suis la récompense et la chaîne. Je suis le sandwich, et, moulé dans ma robe de gluten, mes deux triangles pointant, langoureusement allongés de côté sur ce divan qu’est votre assiette, je suis la muse du capitalisme.

Par le biais du foundfootage, du collage et de la mise en récit de l’épopée du Sandwich, cette exposition met en évidence les liens qui existent entre l’iconique gueuletons et le capitalisme. Immersive et jouissive, «Feeling down. Eating a sandwich. You know the deal. Thanks for watching.» expose l’absurdité autodestructrice d’un système qui ne nous veut pas forcément du bien. Patchwork d’images toutes plus révulsantes, grotesques et dégoûtantes les unes que les autres, elles sont produits et causalités de notre société autophage.

L’un est un régime économique hégémonique valorisant l’individualisme et la surconsommation, l’autre est un régime alimentaire qui frôle la lubie diététique et n’a que faire des bons préceptes de la pyramide des aliments. Objet miroir aux préoccupations croisées, quand l’un veut aller plus vite, l’autre lui fait gagner du temps, et au passage, pas mal d’argent. Si le capitalisme avait un goût, ce serait probablement celui du BLT (bacon, lettuce and tomato), l’en-cas favori des boys club New Yorkais, hauts lieux de convergence des intérêts masculins et du grand capital.

Le sandwich distribué dans le cadre de l’activation culinaire de cette installation vidéo est une création originale des Froufrous de Lilith. Sa forme reprend celle du Kota, lunch des townships sud-africains né pendant l’apartheid et sa garniture est inspirée par le Salada Ppang (Korean Potato Salad Sandwich). C’est une brique que l’on jetterait sur une vitrine un samedi d’émeute, comme c’est une brique qui s’empile sur des milliers d’autres pour aller caresser les cieux des quartiers financiers. Les moules ont été manufacturés sur mesure pour l’occasion et les pains ont cuit dans le four de la microboulangerie Albertivillarienne Panifixion lancée par Bulle Meignan.

Cette exposition est initiée dans le prolongement du Food&Film, un programme d’art vidéo bimestriel organisé par les Froufrous de Lilith (Bulle Meignan et Camille Zéhenne) à DOC!. Métavers, tourisme, animaux, nuit, police … À mi-chemin entre une proposition plastique à part entière et la curation de contenus originaux, le Food&Film prend le temps de s’intéresser à ces thématiques universelles auxquelles on ne réfléchit jamais assez tant elles sont inhérentes à nos existences. Vulgarisateur et philosophie, chaque séance s’accompagne d’une création culinaire à déguster pendant l’entracte, apportant au Food&Film cette dimension multisensorielle et conviviale qui lui est propre.

Texte et commissariat – Mathilda Portoghese

Photographies : Mathieu Roquigny et Vojta Janyska

 

Voir la vidéo de présentation de l’exposition

 

Vues de l’exposition

 

Vernissage

  

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Au Houloc (@le.houloc)
3 rue du Tournant_ Aubervilliers
du 2_09 au 6_09 de 12h à 18h
Vernissage le 01_09 à partir de 18h
Activation culinaire le vendredi soir & le samedi après-midi

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Artistes Camille Zéhenne (@camille_zehenne), Bulle Meignan (@bulle.meignan) (@les_froufrous_de_lilith)
Commissariat Mathilda Portoghese (@mathildaportoghese)

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Avec le soutien de la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France – Ministère de la Culture, de la Fondation de France, de la Ville d’Aubervilliers et du Réseau TRAM.